
Il y a des jours où le ciel semble en colère. Ce ne sont pas seulement les nuages sombres ou les éclairs qui effraient, mais cette pluie, pourtant source de vie, qui se transforme en cauchemar. En ce 13 octobre, Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe, mes pensées retournent aux inondations qui ont paralysé Conakry en août dernier, aux maisons englouties par les glissements de terrain à Manéah, aux familles de Kitikata obligées, année après année, de reculer face à l’avancée silencieuse de l’océan.
On parle souvent de « catastrophes naturelles », comme si la nature seule était responsable. Pourtant, ce que nous vivons en Guinée – comme ailleurs – est aussi la conséquence de décisions humaines : une urbanisation désorganisée, des systèmes de drainage négligés, la construction sur des terrains instables, la destruction des écosystèmes qui nous protégeaient. La nature déclenche l’événement, mais ce sont nos choix qui en font une catastrophe.
À Conakry, les inondations sont devenues une triste habitude. Chaque saison des pluies, elles reviennent, impitoyables. En août 2024, les rues se sont transformées en torrents, emportant des vies et des biens. Moins d’un an plus tard, en 2025, les dégâts sont encore plus lourds. Et ce n’est pas qu’un phénomène urbain : à Manéah, des familles ont été ensevelies ; à Kaback et Koba, la mer ronge les terres cultivées, menaçant les habitations et les moyens de subsistance ; même le Fouta Djallon, ce « château d’eau » de l’Afrique de l’Ouest, est en danger sous l’effet combiné de la déforestation, de l’érosion et de pluies de plus en plus imprévisibles.
Face à cette réalité, il serait tentant de baisser les bras. Mais ce n’est pas une fatalité.
A l’instar de quatres ONGs qui ont travaille dans les differentes regions de la Guinee. Green Transformation 2050 (GT2050) a mene au cœur du Fouta Djallon un projet essentiel : « Sensibiliser les acteurs locaux – élus, OSC, femmes et jeunes – à l’intégration du changement climatique dans la planification locale en Moyenne Guinée ». Cette initiative s’inscrit dans un partenariat stratégique entre l’Agence Nationale de Financement des Collectivités Locales (ANAFIC), les collectivités territoriales et GT2050.
Dans ce cadre, GT2050 a initié une collaboration innovante avec Impact Initiative et Amini.AI pour réaliser une avancée concrète : l’élaboration pour *la PREMIERE FOIS en Giuinee de profils de risque climatique sur mesure pour les 92 collectivités de la region du Fouta*.
Ces profiles sont des véritables cartes de navigation face aux défis climatiques. Ils fournissent aux communes des données fiables et accessibles sur leur exposition aux aléas et leur vulnérabilité spécifique. La méthode allie la précision des données géospatiales à la richesse des enquêtes de terrain menées via les outils climatiques de l’ANAFIC. L’analyse couvre l’ensemble des menaces climatiques : sécheresse, inondations, érosion, feux de brousse, dégradation des sols, complétées par un indicateur global d’exposition. Une approche complète qui transforme la complexité climatique en informations actionnables pour les décideurs locaux.
Grâce à ces profils, les réalités du terrain sont traduites en cartes, en analyses précises, et en solutions concrètes. On peut désormais dire avec certitude : ici, il faut construire un bassin de rétention ; là, il est urgent de reboiser ; ailleurs, il faut déplacer des familles dans des conditions dignes et sécurisées.
Et ces profils ouvrent surtout la voie à l’action.
Imaginez un programme « Conakry sans crues évitables », avec un entretien systématique des caniveaux, encadré par les citoyens. Imaginez le littoral de Kaback–Koba, protégé par des mangroves replantées, véritables boucliers naturels contre l’érosion. Imaginez Manéah, où les versants sont stabilisés grâce à des techniques simples de bio-ingénierie, ou encore des systèmes d’alerte communautaires capables de prévenir à temps les populations d’un danger imminent.
Et puis, il y a le Fouta Djallon. Protéger ses sources, c’est protéger bien plus que la Guinée : c’est préserver l’équilibre hydrique d’une grande partie de l’Afrique de l’Ouest. Il faut penser la résilience à l’échelle des bassins versants, en réunissant éleveurs, agriculteurs, autorités locales et gardiens de l’eau autour d’un objectif commun.
Mais tout cela ne peut pas se faire seul.
Il faut des alliances : avec les bailleurs de fonds, la diaspora, le secteur privé, les radios communautaires, les compagnies d’assurance, les opérateurs téléphoniques. Chacun a un rôle à jouer. Chaque geste compte : un hectare restauré, une famille relogée, une alerte transmise à temps.
En ce jour de réflexion mondiale, le message est clair : il vaut mieux prévenir que guérir.
Agir avant que la pluie ne tourne au drame.
Parce que derrière chaque chiffre, chaque statistique, il y a des vies, des visages, des histoires.
La résilience ne se proclame pas. Elle se construit, patiemment, collectivement, sur le terrain.
Avec les communautés, avec les autorités, et avec tous ceux qui croient qu’un avenir différent est possible, GT2050 poursuit son action. Pour qu’un jour, la saison des pluies ne soit plus un moment de peur, mais une période d’espoir, de solidarité et d’adaptation.
Par Alpha Oumar Kaloga Président de l’ONG Green Transformation2050






